"Ma chère Thérèse, puisque vous me permettez de ne pas vous appeler Mlle, apprenez une nouvelle importante dans le monde des arts, comme dit notre ami Bernard. Tiens ! ça rime ; mais ce qui n’a ni rime ni raison, c’est ce que je vais vous raconter.
Figurez-vous qu’hier, après vous avoir ennuyée de ma visite, je trouvai, en rentrant chez moi, un milord anglais... Après ça, ce n’est peut-être pas un milord ; mais, pour sûr, c’est un Anglais, lequel me dit en son patois :
– Vous êtes peintre ?
– Yes, milord.
– Vous faites la figure ?
– Yes, milord.
– Et les mains ?
– Yes, milord ; les pieds aussi.
– Bon !
– Très bons !
– Oh ! je suis sûr !
– Eh bien ! voulez-vous faire le portrait de moi ?
– De vous ?
– Pourquoi pas ?
Le pourquoi pas fut dit avec tant de bonhomie, que je cessai de le prendre pour un imbécile, d’autant plus que le fils d’Albion est un homme magnifique. C’est la tête d’Antinoüs sur les épaules de... sur les épaules d’un Anglais ; c’est un type grec de la meilleure époque sur le buste un peu singulièrement habillé et cravaté d’un spécimen de la « fashion » britannique."
Thérèse (Elle) et Laurent (Lui) sont deux artistes peintres qui s'aiment passionnément mais leurs différences tourmentent cet amour...
George Sand (1804-1876) est une femme de lettres française. Son œuvre remarquablement prolifique est marquée par son positionnement en faveur des droits des femmes et contre les valeurs d'une société conservatrice. Elle est notamment l'auteur de Elle et Lui, qui revient sur sa relation tumultueuse avec Alfred de Musset, de La Mare au diable et de La petite Fadette.