Avec son peuple d’animaux et de végétaux auxquels des acteurs humains donnent sans sourciller la réplique, la fable joue sur les frontières : entre l’imaginaire et la réalité, l’enchantement et la vérité, la sagesse et la puérilité, l’animalité et l’humanité, l’écriture et l’oralité, et par-dessus tout entre les sphères culturelles, les langues et les époques. Héritière des civilisations mésopotamiennes de l’âge du bronze, la fable constitue le genre littéraire le plus continûment et le plus universellement cultivé de l’Antiquité à nos jours : d’Orient en Occident, les recueils d’apologues se comptent par centaines. Au sein de cette galaxie, les récits et anecdotes qu’on attribue à Ésope (VIe s. avant J.-C.) occupent une place privilégiée. On les découvrira ici, accompagnés pour la première fois en édition de poche de la Vie romancée qui installe durablement la légende d’Ésope, cet esclave difforme et monstrueux, aussi subtil que redoutable, celui que La Fontaine considérait comme le père d’un genre toujours vivace et fascinant.